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Programmation et déprogrammation : liens entre les études de Watson & Rayner, Cover Jones et la Psychogénéalogie
Watson, J. B., & Rayner, R. (1920). Conditioned emotional reactions. Journal of Experimental Psychology, 3(1), 1–14.
Jones, Mary Cover, A Laboratory Study of Fear: The Case of Peter, Pedagogical Seminary; Provincetown, Mass., etc. Vol. 31, (Jan 1, 1924): 308-315. 

Résumé : Les études de Watson et Rayner (1920) et de Mary Cover Jones (1924) montrent comment les émotions peuvent être à la fois programmées et déprogrammées. Watson et Rayner ont prouvé que la peur pouvait être créée par association avec des stimuli, tandis que Cover Jones a démontré que ces peurs pouvaient être réduites en associant le stimulus à des expériences positives. Ces concepts peuvent être appliqués en psychogénéalogie pour comprendre et modifier les schémas émotionnels hérités, en utilisant des méthodes similaires pour remplacer les comportements négatifs par des schémas positifs.

La programmation (ou conditionnement)

John B. Watson voulait démontrer que les émotions humaines pouvaient être conditionnées de la même manière que les comportements simples. L'objectif de cette étude était de montrer que la peur pouvait être apprise par le conditionnement classique (selon le concept de Pavlov).

Le « Petit Albert » était le pseudonyme donné à un enfant de 9 mois, un bébé en bonne santé et décrit comme calme. Au départ, Albert n'avait pas peur des animaux ou d'autres objets (comme les rats, les lapins, ou les masques). Watson et Rayner ont voulu conditionner une réaction émotionnelle de peur chez Albert en utilisant un rat blanc.

L'expérience s'est déroulée en plusieurs étapes :

  1. Évaluation initiale : Watson et Rayner ont d'abord présenté au petit Albert divers objets (un rat blanc, un lapin, un chien, des masques) pour vérifier s'il montrait une quelconque réaction de peur. Albert était au départ indifférent et n'avait peur d'aucun de ces objets.

  2. Conditionnement de la peur : Pour conditionner la peur, Watson et Rayner ont associé la présence du rat blanc à un bruit fort et soudain (frapper une barre métallique avec un marteau derrière Albert). Ce bruit terrifiant provoquait naturellement une réaction de peur chez Albert.

  3. Répétition de l'association : En répétant l’association du rat blanc avec le bruit fort, Albert a commencé à pleurer et à montrer des signes de peur à la simple vue du rat, même sans le bruit. Cela montrait qu'il avait appris à associer le rat blanc à la peur.

  4. Généralisation de la peur : Watson et Rayner ont découvert que la peur conditionnée ne se limitait pas au rat blanc. Albert a également montré des réactions de peur en présence d'objets similaires, comme un lapin, un chien, et même des objets avec de la fourrure ou des cheveux blancs, montrant ainsi une généralisation de la peur.

L’expérience a démontré que les réactions émotionnelles pouvaient être conditionnées chez l’humain par des méthodes simples d’association, et que ces réactions pouvaient ensuite se généraliser à des stimuli similaires.

La déprogrammation (ou dé-conditionnement)

Mary Cover Jones est souvent appelée la « mère de la thérapie comportementale » en raison de ses travaux novateurs sur le conditionnement et la désensibilisation des peurs. « L'expérience de Peter » avait pour but de démontrer comment il est possible de réduire une peur conditionnée chez un enfant, en l’occurrence, la peur des animaux.

Peter, un jeune garçon, avait une peur intense des lapins ainsi que d'autres objets ou animaux similaires. Cette peur semblait irrationnelle et perturbait son quotidien. Mary Cover Jones a utilisé une technique appelée désensibilisation systématique, qui consiste à exposer progressivement une personne à l'objet de sa peur tout en l'associant à une expérience agréable.

Voici comment elle a procédé :

  1. Exposition progressive : Peter était exposé au lapin de manière progressive et contrôlée. Dans les premières sessions, le lapin était tenu à une distance où Peter se sentait en sécurité.

  2. Association positive : En même temps que le lapin était progressivement rapproché, Peter recevait quelque chose qu’il appréciait, comme de la nourriture. Par exemple, il mangeait son goûter préféré tout en regardant le lapin de loin, puis à mesure qu'il devenait plus à l'aise, le lapin était rapproché.

  3. Augmentation graduelle de la proximité : Au fur et à mesure des séances, la distance entre Peter et le lapin était réduite, jusqu'à ce que Peter soit capable de toucher le lapin sans peur.

Grâce à cette méthode, Mary Cover Jones a réussi à réduire, puis à éliminer la peur de Peter envers le lapin. Cela a prouvé que les peurs conditionnées pouvaient être désapprises à travers des techniques de dé-conditionnement. Ces deux études complémentaires montrent que les peurs conditionnées peuvent être déprogrammées.

Lien avec la psychogénéalogie et les schémas transgénérationnels

La psychogénéalogie explore la transmission transgénérationnelle des schémas émotionnels et comportementaux. Les concepts de conditionnement (Watson & Rayner) et de dé-conditionnement (Cover Jones) s'appliquent à cette approche, illustrant comment des schémas émotionnels ou comportementaux peuvent être acquis et, tout aussi important, modifiés ou libérés.

Dans le cadre de la psychogénéalogie :

  1. Programmation transgénérationnelle : Les schémas répétitifs ou les phobies observés dans les familles peuvent être vus comme des formes de « programmation » transmise par les histoires familiales, les croyances, ou les événements traumatiques. Tout comme Albert a appris à avoir peur du rat, une personne peut « apprendre » inconsciemment une peur ou un schéma à travers les récits familiaux ou les comportements observés chez ses parents.
     

  2. Déprogrammation-reprogrammation : En psychogénéalogie, cela passe par la prise de conscience des schémas répétitifs, la compréhension de leur origine, et le travail symbolique pour les « déprogrammer » ou s’en libérer. Comme Mary Cover Jones a déprogrammé Peter de sa peur en utilisant des associations positives, certaines techniques visent à reprogrammer l’individu pour briser les cycles de souffrance, en modifiant les perceptions, croyances, et comportements hérités. Cette reprogrammation peut se faire par des rituels symboliques, des changements de perception ou des exercices thérapeutiques visant à intégrer différemment les émotions associées aux schémas familiaux.

     

En conclusion, l'étude de Watson et Rayner illustre comment les peurs peuvent être programmés, et celle de Mary Cover Jones montre comment elles peuvent être déprogrammées. Ces concepts se rejoignent dans la psychogénéalogie, où il est possible de libérer des schémas répétitifs transgénérationnels par un travail de conscientisation et de reprogrammation émotionnelle.

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